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Photo du rédacteurEmmanuelle Cordoliani

ÉCRIRE L'ÉTÉ XXI



Les jours de vraie solitude sont assez rares pour être mentionnés. Bouchées triples sur le classement et les mises à jour, joie des chantiers multiples qui cohabitent sur le grand territoire d’écriture.

Il y a un côté très « Couture » à préparer l’édition an 4 du Journal d’un mot, alors même que les trois premières années ne sont encore en accès libres que pour ceux et celles qui ont mis la main à la maçonnerie de la maison des Fées fâchées. Préparer en été la collection hiver…

Il faut dire que suite à l’avarie informatique de janvier, l’an 4 peine à ramasser ses dents. Une vraie chasse au trésor pour retrouver les entrées postées en billets Facebook et faire la comptabilité exacte de ce qui a été perdu dans la bataille. À ce jour seules 6 semaines sur 52 sont complètes avec 7 entrées chacune pour leur mot. Il y en a une grosse dizaine, auxquelles ne manque que l’entrée du dimanche : je m’étais mise sous le coude exprès, avec l’idée plaisante de la renseigner en fin de course, dans le fil de la relecture de l’ensemble. Autant pour le pique-nique au soleil : il manque des semaines entières de travail englouties dans la débâcle… Mais j’ai mis au point un cahier de travail qui me permet d’y voir clair, ce qui est plus de la moitié du travail. Par ailleurs, le Carnet des jours suivants, commencé à l’automne 22, fournit son lot d’entrées. Je remarque en passant une constante dans mes projets : je privilégie des formats qui me mettent dans l’impossibilité de me souvenir de ce que j’ai écrit. Le Carnet des jours suivants compte à ce jour 250 entrées, le Sérail 280 pages en format livre et par-dessus le marché je ne me tiens ni à un thème ni à une narratrice unique. Cette constatation n’est pas une déploration, plutôt un soulagement de voir de mieux en mieux où je veux en venir.

Parlant de ce narrateur unique, qui ressemble drôlement (au sens belge de l’adjectif : étrangement) à celui ou celle qui écrit les mots à grand renfort d’huile de coude, je retrouve dans les notes de l’été dernier cette citation, qui éclaire assez bien ma position sur le sujet :

J’appris l’art infernal de tromper sans mentir, ou du moins de faire servir la vérité au mensonge ; c’est en parlant de ce que je sentais que je le déguisais le mieux. Je révélais une partie de mes impressions, mais j’en cachais la source…

Alys/Astolphe de Custine.


La première édition audio de la Dose de Poésie est partie. Peu de réactions, compte tenu du nombre de destinataires, mais une grande chaleur dans celles qui arrivent. J’ai essayé de faire ça avec davantage d’esprit pratique que de souci de perfection. Là encore, je commence à me reconnaître : le projet, c’est que ça dure. Si je me coince dans les problématiques (passionnantes) que nous abordons avec mon collègue Jean-Christophe Messonnier dans le cadre du podcast Non loin de là, que nous réalisons depuis deux ans avec les élèves de master II du CNSMDP, si je cherche la petite bête sur les enchaînements poèmes/transitions/poèmes (les indicatifs intermédiaires au zarb m’ont été offerts par le compositeur Damien Lehman), si je commence à redouter l’ennui de l’auditoire de n’entendre que mon timbre pendant les dix minutes que dure l’exercice… eh bien, il y aura une Dose audio par mois, voire par trimestre. Dose rare pour laquelle il faudrait élire une sélection de poèmes… tout cela allant à rebours du projet initial tel que formulé par le parrain Goethe :

On devrait souhaiter à tout homme sensé une certaine dose de poésie. Ce serait le vrai moyen de lui donner de la dignité et de la grâce, quelle que fût sa position.


Spécial Polar gantois :

On trouve d’innombrables sites sur le Net qui vous explique comment écrire un roman en une semaine, un mois, un trimestre. Je n’en ai pas vu qui s’offre à une année d’accompagnement, c’est assez révélateur. On trouve également beaucoup de recettes pour le polar (en cinq points, en douze…). Je ne fais pas là allusion à l’excellent How to Write a Detective Story de G.K Chesterton, mais plutôt à des séries de conseils qui devraient plutôt titrer : comment écrire un roman policier si vous n’en avez jamais lu, que vraiment vous n’avez pas la moindre idée de ce qui s’y passe, que vous débarquez de la planète Mars. Bref, il ne va pas être question de ce genre de fadaises dans ce très sérieux journal, puisque le chantier qui m’occupe consiste à savoir : peut-on écrire un polar trois jours par an ? Pour ma part, la réponse est oui. C’est l’exercice auquel je m’adonne chaque fois que je suis à Gand (entre deux à cinq jours par an). Si votre curiosité est piquée (ou si vous l’êtes vous-même), il est possible de se référer à l’article Polar gantois (processus). Pour ce qui est de ma légitimité dans le genre, je me référerai à mon lourd passé (et présent) de lectrice : une fois atteint l’âge adulte, les polars ont remplacé pour une part les livres de conte. Ils m’ont aidé à traverser les périodes d’adversité, surtout par leur violence hors du commun (salutations spéciales à David Peace, avec sa série 1974, 1977, 1980, 1983 et à Brigitte Auber, pour la Mort des Bois), mais ils ont également été de formidable sparring-partners dans les moments où le goût de lire, usé par trop d’obligations, d’essais, se perdait, au point de faire du sur place sur un quart de page. Mais j’ai d’autres garants : je peux jouer la carte de l’appel à un ami avec Ugo Pandolfi, si je me retrouve en cale sèche, et, enfin, me remparer derrière une citation de ce bon vieux G.K Chesterton, valorisant mes talents de dramaturges pour l’exercice :

Force est d’avouer qu’on trouve dans nombre de romans policiers autant de crimes sensationnels que dans une pièce de Shakespeare.

Maintenant, je ne suis pas certaine de vouloir écrire un « polar-polar », si tant est que cela existe. Un roman noir, c’est plutôt la forme que prend cette affaire gantoise. Mais dans les nombreux épisodes du Carnet se déroulant sur un campus imaginaire, qui, entre nous soit dit, à pour ont pour vocation première de faire passer avec une cuillère de miel bien des histoires de boulot, vécues ou entendues, il y a la base pour un excellent Whodunnit.


En périphérie :
Il n’y a rien de plus inquiétant que de faire partie de quelque chose qu’on ne comprend pas.

Agatha Christie


De l’écoute d’une émission consacrée à Sophie de Mijolla-Mellor Un divan pour Agatha Christie, je retiens l’histoire de la Chandelle. C’est une histoire à intrigue, policière probablement, dont la mère d’Agatha Christie lui raconte deux épisodes. Elle est interrompue par une visite familiale et quand, quelques jours plus tard, la petite fille demande la fin de l’histoire, la mère n’a pas la moindre idée de ce qu’elle veut…

La même mère interdit à sa fille l’apprentissage de la lecture jusqu’à l’âge de 8 ans.

L’épisode de la disparation de l’autrice, après que Hercule Poirot en a listé les causes les plus fréquentes. Cette disparition fait suite au décès de sa mère, qui l’a contrainte à vider sa maison et confrontée également à des souvenirs de sa grand-mère. Au même moment, son mari lui annonce son intention de divorcer. À la réception de l’hôtel où elle se cache, elle donne le nom de sa rivale.

Et une fameuse liste de lectures : Le besoin de savoir / Sophie de Mijolla-Mellor Le détective de Freud / Olivier Bare-Cabuçon

La dernière énigme / Agatha Christie


En attendant mieux, vous trouverez ici la rétrospective augmentée du prolongement de cette année : un prolongement du côté du plan et non du côté du texte. Il est fort possible que les nombreuses mises à jour des autres manuscrits depuis quelques semaines, aient produit cet effet. J'accueille cela comme le reste : avec la meilleure grâce du monde.

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